Article de presse - Prescriptions Santé n°58 - mars 2011
Médecin régional : l'expert médical en région
Le métier de médecin régional a connu une histoire mouvementée : missions variées, rattachement hiérarchique fluctuant, lien compliqué avec les forces de ventes. Aujourd'hui, la professionnalisation est en marche.
Qui sont ces quelques 400 médecins régionaux recensés en France ? Quel est leur profil, leur rôle ? Pas si simple de répondre à ces questions, car la définition du poste est longtemps restée hétérogène. La charte de la visite médicale, en 2004, a pallié ce manque... par défaut, en précisant ce qu'un médecin régional (MR) n'était pas. Pour autant, un « portrait-robot » peut être dessiné : le plus souvent médecin généraliste, le MR peut aussi être un scientifique, le manque de médecins dans l'industrie ayant rendu nécessaire le recrutement d'autres profils.
Éventail de missions
Ses missions sont de plusieurs ordres : désormais spécialisé sur un domaine ou un produit, le MR rassemble des informations médicales, contacte les leaders d'opinion, met en place des essais cliniques ou identifie des centres investigateurs, forme les forces de vente. Par le passé, les MR ont souvent été rattachés, hiérarchiquement, à la direction des ventes. Mais le contexte, en particulier réglementaire, a changé, contribuant à professionnaliser le poste, à privilégier une communication plus éthique. Résultat, le consensus tend aujourd'hui à rattacher la fonction aux directions médicales, avec des objectifs qualitatifs, consistant notamment à visiter tels centres ou ARS jugés clés. Pour autant, il n'y a pas de barrière avec le commercial : comme le souligne Ludovic Jubé, d'Altigapharma (1), les équipes qui ont le mieux fonctionné sont celles qui ont travaillé en synergie avec les ventes.
Quelle valeur ajoutée ?
La fonction de médecin régional n'est pas pérenne. Et pour cause : elle est liée aux produits. Si, du côté des MR, la fonction est plus valorisante sur un produit de spécialité, hospitalier, que sur un produit de ville « grand public », moins technique, du côté des labos, c'est le cycle de vie du produit qui est clé : le besoin de MR est important en phase de lancement, moins en période de « creux », expliquant l'instabilité des équipes et l'attrait des labos, dans le passé, pour l'externalisation via la prestation. Autre point sensible : les groupes calculent des retours sur investissement pour les différentes fonctions au sein de l'entreprise. Une démarche compliquée pour les MR, qui n'ont pas d'objectif de ventes : difficile de mesurer une valeur ajoutée qualitative... Résultat, ils sont souvent considérés comme un coût. Un coût d'autant plus élevé qu'il s'agit de postes bien rémunérés (environ 80 K euros, au global, par an, pour un débutant). La pénurie de médecins, en partie palliée par l'arrivée de médecins à diplôme étranger, explique ces rémunérations qui, si elles sont attractives, sont cependant assez peu évolutives au fil des carrières.
Évolutivité
Si le salaire est un avantage, il n'est pas le seul. Nombre de MR s'accordent à le dire : le métier est varié et ses nombreuses interactions lui confèrent un intérêt certain. Il ne saurait dès lors être considéré comme un simple tremplin pour entrer dans l'industrie. En outre, il permet d'évoluer vers d'autres fonctions : affaires médicales, recherche clinique, management, marketing, formation... Enfin, l'arrivée des Agences régionales de santé constitue une vraie opportunité pour les médecins régionaux : face aux médecins des ARS, responsables de l'offre et de l'organisation des soins, le MR a en effet toute légitimité pour discuter entre pairs. Des équipes se mettent en place au sein des laboratoires, confrontés à des choix : si la réflexion reste ouverte, certains groupes ont tranché et souhaitent donner une place importante aux médecins. Reste à les motiver...
Le métier de MR ne doit pas être considéré comme un simple tremplin pour entrer dans l'industrie. Il permet d'évoluer vers d'autres fonctions : affaires médicales, recherche clinique, management, marketing, formation....
Valérie Moulle
(1) Conférence de l'AMIPS, décembre 2010